Ceux qui ont croisé Pierre Antoniucci (comme étudiant aux beaux-arts de Rennes et Tours ou comme amateurs d’art) ont été marqués par lui. Très soucieux de la question des affinités et de la transmission, il adhéra à mon idée d’exposition autour d’un prof et de ses élèves. C’était à Pont-Scorff il y a 10 ans. Le revoilà à Rennes à la Galerie ONIRIS 

Pierre Antoniucci y affirme toujours son plaisir de peindre et de réfléchir le tableau à travers un travail entre figuration et abstraction.

Depuis plusieurs décennies, l’artiste a développé diverses manières de s’exprimer, notamment avec le dessin et les pliages de la toile ou du papier créant des reliefs et des discontinuités dans la lecture du sujet.

Ses tableaux sont des « additions de soustractions ». Ils résultent d’accumulations de motifs successivement recouverts, enfouis, totalement ou partiellement, au gré des recherches du peintre, sous des couches de cendres. Ce qui est voué à disparaître constitue la matière du tableau, voire le tableau lui-même.

Là où d’autres pourraient se satisfaire simplement de l’apparition de l’idée, de l’esquisse d’une association de formes et de couleurs, Pierre Antoniucci développe jusqu’au bout les propriétés des agencements plastiques mis en œuvre sur chaque thème, dans chaque procédure de travail.

 L’exposition « Coulisses » présente ses œuvres récentes, dont des peintures sur cartons de grand format et modulaires issus de son travail intitulé « JAB » que Pierre Antoniucci présente avec ses mots :

 « Des visages, de femmes et d’hommes, des cortèges d’animaux, de chevaux, de chats, etc. Ils sortent de la barque d’un Noé. Ils se regardent, ils vous regardent, de face, de profil ou de trois quarts en silence. Ce silence comme ces figures qui habitent mes tableaux sont là depuis longtemps. Comme depuis toujours. Ils m’aident à être le contemporain des anciens, de ceux que j’aime. Ces quelques figures sont des présences. Elles n’illustrent aucune parole. L’expressivité remplace les mots qui ne se soumettent à aucune narration. L’absence d’ambition narrative veut être ici le critère de la peinture : réduit à des présences, à des énigmes et aux spectres, le tableau s’implique, côtoie ou convoque naturellement les domaines métaphysiques comme celui de l’ornement. Ils ont de tout temps accompagné la sociabilité de la peinture. Dans cette exposition, à la galerie Oniris, je fais entrer cette figuration dans une nouvelle machinerie que j’appelle JAB. A l’origine de la peinture Jab il y a la création d’un flux de dessins préparatoires dans des cahiers quotidiens. Dans ces cahiers, chaque dessin engage une course poursuite avec le précédent. J’utilise pour cela une encre qui traverse le papier et dépose sur le recto de la feuille l’image inversée de la précédente. Un flux continu s’engage alors comme des sauts de forme à forme, de figure à figure. C’est dans ce défilé que je choisis l’hypothèse d’un tableau. Le va et vient de la forme, le vice versa des figures, l’aller-retour, multiplient les transformations de modèles pour offrir le plus large choix au départ du tableau. La peinture Jab commence. Je travaille sur un support de carton nid d’abeille. L’emploi de ce type de support permet d’accéder à des formats monumentaux légers et résistants en associant les plaques les unes aux autres Le principe du travail Jab est de pouvoir déplacer librement ces surfaces pour construire de nouvelles compositions, d’agrandir ainsi le champ visuel ou bien de le réduire. C’est le jeu de coulissement ou chevauchement des plaques entre elles qui permet l’extension comme la contraction du format. Ce procédé engendre le décadrage des figures et dynamise la perception du tableau. Le coulissement des images sur elles-mêmes procure un effet de tuilage et de nouveau point de vue. Ma peinture trouve des échos dans les cadres médiévaux ou le primitivisme italien du quattrocento ou des fresques étrusques. Mes figures ne sont pas prises dans un fond naturalisme perspectiviste mais plutôt dans une projection constructiviste d’une avant-garde russe : leurs fonds se couvre de fragment de mots d’un texte devenu illisible qui peut suggérer un passage sur les murs contemporains couverts de graffs. Ici l’image est comme une parole coupée »

« COULISSES », EXPOSITION PERSONNELLE D’ŒUVRES RÉCENTES À DÉCOUVRIR DU VENDREDI 25 FÉVRIER AU SAMEDI 16 AVRIL 2022 à 

En complément, j’ajoute le texte introductif de la 13ème édition de L’Art chemin faisant…  à Pont-Scorff (56). Elle prenait une forme nouvelle qui interroge la transmission de l’art, les relations entre artistes et les affinités qui créent une « école » au sens symbolique du terme.
Pierre Antoniucci inaugura cette démarche. L’artiste, dont l’enseignement avait profondément marqué ses élèves aux Beaux Arts de Rennes et de Tours, était passionné par cette question, déjà abordée avec Philia (à Brest en 1999), cette fois sous-titrée « l’équipée ». Notion de groupe et d’aventure pour une expérience rare qui permet de réunir des artistes liés tout d’abord par l’amitié mais aussi par le respect de leurs singularités.

Autour de Pierre Antoniucci, cette équipée rassemblait Peter Briggs, Loïc Le Groumellec, Claire Rado, André Robillard, Philippe Berthommier, Christian Henry, Léonard de Selva, Alexis Forestier, Alain Gauvin, Nora Philippe et Cécile Saint-Paul. Des personnalités et des talents aussi variés que reconnus. Un éventail de techniques assemblant peinture, sculpture, photo, vidéo, installations, art brut… jusqu’à l’esprit du cabinet de curiosités, avec des pièces issues de collections personnelles, présentées en une douzaine de lieux.


1 commentaire

bourges · 2 mars 2022 à 19 h 34 min

où la galerie oniris ?

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